25: Convention du 14 mars 1978 sur la loi applicable aux régimes matrimoniaux

Entrée en vigueur: 1-IX-1992


 

 

 

 

CONVENTION SUR LA LOI APPLICABLE AUX RÉGIMES MATRIMONIAUX

(Conclue le 14 mars 1978)

 

Les Etats signataires de la présente Convention,

Désirant établir des dispositions communes concernant la loi applicable aux régimes matrimoniaux,

Ont résolu de conclure une Convention à cet effet et sont convenus des dispositions suivantes :

 

chapitre i - champ d'application de la convention

Article premier

La présente Convention détermine la loi applicable aux régimes matrimoniaux.

Elle ne s'applique pas :

1. aux obligations alimentaires entre époux ;
2. aux droits successoraux du conjoint survivant ;
3. à la capacité des époux.

Article 2

La Convention s'applique même si la nationalité ou la résidence habituelle des époux ou la loi applicable en vertu des articles ci-dessous ne sont pas celles d'un Etat contractant.

 

chapitre ii - loi applicable

Article 3

Le régime matrimonial est soumis à la loi interne désignée par les époux avant le mariage.

Les époux ne peuvent désigner que l'une des lois suivantes :

1. la loi d'un Etat dont l'un des époux a la nationalité au moment de cette désignation ;
2. la loi de l'Etat sur le territoire duquel l'un des époux a sa résidence habituelle au moment de cette désignation ;
3. la loi du premier Etat sur le territoire duquel l'un des époux établira une nouvelle résidence habituelle après le mariage.

La loi ainsi désignée s'applique à l'ensemble de leurs biens.

Toutefois, que les époux aient ou non procédé à la désignation prévue par les alinéas précédents, ils peuvent désigner, en ce qui concerne les immeubles ou certains d'entre eux, la loi du lieu où ces immeubles sont situés. Ils peuvent également prévoir que les immeubles qui seront acquis par la suite seront soumis à la loi du lieu de leur situation.

Article 4

Si les époux n'ont pas, avant le mariage, désigné la loi applicable à leur régime matrimonial, celui-ci est soumis à la loi interne de l'Etat sur le territoire duquel ils établissent leur première résidence habituelle après le mariage.

Toutefois, dans les cas suivants, le régime matrimonial est soumis à la loi interne de l'Etat de la nationalité commune des époux :

1. lorsque la déclaration prévue par l'article 5 a été faite par cet Etat et que son effet n'est pas exclu par l'alinéa 2 de cet article ;
2. lorsque cet Etat n'est pas Partie à la Convention, que sa loi interne est applicable selon son droit international privé, et que les époux établissent leur première résidence habituelle après le mariage :

a) dans un Etat ayant fait la déclaration prévue par l'article 5, ou
b) dans un Etat qui n'est pas Partie à la Convention et dont le droit international privé prescrit également l'application de leur loi nationale ;

3. lorsque les époux n'établissent pas sur le territoire du même Etat leur première résidence habituelle après le mariage.

A défaut de résidence habituelle des époux sur le territoire du même Etat et à défaut de nationalité commune, leur régime matrimonial est soumis à la loi interne de l'Etat avec lequel, compte tenu de toutes les circonstances, il présente les liens les plus étroits.

Article 5

Tout Etat pourra, au plus tard au moment de la ratification, de l'acceptation, de l'approbation ou de l'adhésion, faire une déclaration entraînant l'application de sa loi interne, selon l'article 4, alinéa 2, chiffre 1.

Cette déclaration n'aura pas d'effet pour des époux qui conservent tous deux leur résidence habituelle sur le territoire de l'Etat où, au moment du mariage, l'un et l'autre avaient leur résidence habituelle depuis cinq ans au moins, sauf si cet Etat est un Etat contractant ayant fait la déclaration prévue par l'alinéa premier du présent article, ou un Etat non Partie à la Convention et dont le droit international privé prescrit l'application de la loi nationale.

Article 6

Les époux peuvent, au cours du mariage, soumettre leur régime matrimonial à une loi interne autre que celle jusqu'alors applicable.

Les époux ne peuvent désigner que l'une des lois suivantes :

1. la loi d'un Etat dont l'un des époux a la nationalité au moment de cette désignation ;
2. la loi de l'Etat sur le territoire duquel l'un des époux a sa résidence habituelle au moment de cette désignation.

La loi ainsi désignée s'applique à l'ensemble de leurs biens.

Toutefois, que les époux aient ou non procédé à la désignation prévue par les alinéas précédents ou par l'article 3, ils peuvent désigner, en ce qui concerne les immeubles ou certains d'entre eux, la loi du lieu où ces immeubles sont situés. Ils peuvent également prévoir que les immeubles qui seront acquis par la suite seront soumis à la loi du lieu de leur situation.

Article 7

La loi compétente en vertu des dispositions de la Convention demeure applicable aussi longtemps que les époux n'en ont désigné aucune autre et même s'ils changent de nationalité ou de résidence habituelle.

Toutefois, si les époux n'ont ni désigné la loi applicable, ni fait de contrat de mariage, la loi interne de l'Etat où ils ont tous deux leur résidence habituelle devient applicable, aux lieu et place de celle à laquelle leur régime matrimonial était antérieurement soumis :

1. à partir du moment où ils y fixent leur résidence habituelle, si la nationalité de cet Etat est leur nationalité commune, ou dès qu'ils acquièrent cette nationalité, ou
2. lorsque, après le mariage, cette résidence habituelle a duré plus de dix ans, ou
3. à partir du moment où ils y fixent leur résidence habituelle, si le régime matrimonial était soumis à la loi de l'Etat de la nationalité commune uniquement en vertu de l'article 4, alinéa 2, chiffre 3.

Article 8

Le changement de la loi applicable en vertu de l'article 7, alinéa 2, n'a d'effet que pour l'avenir, et les biens appartenant aux époux antérieurement à ce changement ne sont pas soumis à la loi désormais applicable.

Toutefois, les époux peuvent, à tout moment et dans les formes prévues à l'article 13, soumettre l'ensemble de leurs biens à la nouvelle loi, sans préjudice, en ce qui concerne les immeubles, des dispositions de l'article 3, alinéa 4, et de l'article 6, alinéa 4. L'exercice de cette faculté ne porte pas atteinte aux droits des tiers.

Article 9

Les effets du régime matrimonial sur un rapport juridique entre un époux et un tiers sont soumis à la loi applicable au régime matrimonial en vertu de la Convention.

Toutefois, le droit d'un Etat contractant peut prévoir que la loi applicable au régime matrimonial ne peut être opposée par un époux à un tiers lorsque l'un ou l'autre a sa résidence habituelle sur son territoire, à moins :

1. que des conditions de publicité ou d'enregistrement prévues par ce droit aient été remplies, ou
2. que le rapport juridique entre cet époux et le tiers ait pris naissance alors que le tiers connaissait ou devait connaître la loi applicable au régime matrimonial.

Le droit de l'Etat contractant où un immeuble est situé peut prévoir une règle analogue pour les rapports juridiques entre un époux et un tiers concernant cet immeuble.

Tout Etat contractant a la possibilité de spécifier au moyen d'une déclaration la portée des alinéas 2 et 3 du présent article.

Article 10

Les conditions relatives au consentement des époux quant à la loi déclarée applicable sont déterminées par cette loi.

Article 11

La désignation de la loi applicable doit faire l'objet d'une stipulation expresse ou résulter indubitablement des dispositions d'un contrat de mariage.

Article 12

Le contrat de mariage est valable quant à la forme si celle-ci répond soit à la loi interne applicable au régime matrimonial, soit à la loi interne en vigueur au lieu où le contrat a été passé. Il doit toujours faire l'objet d'un écrit daté et signé des deux époux.

Article 13

La désignation par stipulation expresse de la loi applicable doit revêtir la forme prescrite pour les contrats de mariage, soit par la loi interne désignée, soit par la loi interne du lieu où intervient cette désignation. Elle doit toujours faire l'objet d'un écrit daté et signé des deux époux.

Article 14

L'application de la loi déterminée par la Convention ne peut être écartée que si elle est manifestement incompatible avec l'ordre public.

 

chapitre iii - dispositions diverses

Article 15

Aux fins de la Convention, une nationalité n'est considérée comme nationalité commune des époux que dans les cas suivants :

1. les deux époux avaient cette nationalité avant le mariage ;
2. un époux a volontairement acquis la nationalité de l'autre au moment du mariage ou ultérieurement, soit par une déclaration prévue à cet effet, soit en ne déclinant pas cette acquisition alors qu'il savait que ce droit lui était ouvert ;
3. les deux époux ont volontairement acquis cette nationalité après le mariage.

Sauf dans les cas visés par l'article 7, alinéa 2, chiffre 1, les dispositions se référant à la nationalité commune ne sont pas applicables lorsque les époux ont plus d'une nationalité commune.

Article 16

Aux fins de la Convention, lorsqu'un Etat comprend deux ou plusieurs unités territoriales dans lesquelles des systèmes de droit différents s'appliquent en matière de régimes matrimoniaux, toute référence à la loi nationale d'un tel Etat est entendue comme visant le système déterminé par les règles en vigueur dans cet Etat.

A défaut de telles règles, on entend par Etat dont un époux a la nationalité, au sens des articles 3, alinéa 2, chiffre 1, et 6, alinéa 2, chiffre 1, l'unité territoriale où cet époux a eu en dernier lieu sa résidence habituelle ; de même, pour l'application de l'article 4, alinéa 2, on entend par Etat de la nationalité commune des époux l'unité territoriale où l'un et l'autre a eu, en dernier lieu, une résidence habituelle.

Article 17

Aux fins de la Convention, lorsqu'un Etat comprend deux ou plusieurs unités territoriales dans lesquelles des systèmes de droit différents s'appliquent en matière de régimes matrimoniaux, toute référence à la résidence habituelle dans un tel Etat est interprétée comme visant la résidence habituelle dans une unité territoriale de cet Etat.

Article 18

Un Etat contractant qui comprend deux ou plusieurs unités territoriales dans lesquelles des systèmes de droit différents s'appliquent en matière de régimes matrimoniaux n'est pas tenu d'appliquer les règles de la Convention aux conflits entre les lois de ces unités, lorsque la loi d'aucun autre Etat n'est applicable en vertu de la Convention.

Article 19

Aux fins de la Convention, lorsqu'un Etat connaît, en matière de régimes matrimoniaux, deux ou plusieurs systèmes de droit applicables à des catégories différentes de personnes, toute référence à la loi d'un tel Etat est entendue comme visant le système de droit déterminé par les règles en vigueur dans cet Etat.

A défaut de telles règles, la loi interne de l'Etat de la nationalité commune des époux s'applique dans le cas prévu à l'article 4, alinéa premier, et la loi interne de l'Etat dans lequel ils avaient tous deux leur résidence habituelle reste applicable dans le cas prévu à l'article 7, alinéa 2, chiffre 2. A défaut de nationalité commune des époux, l'article 4, alinéa 3, s'applique.

Article 20

La Convention ne déroge pas aux instruments internationaux auxquels un Etat contractant est ou sera Partie et qui contiennent des dispositions sur les matières réglées par la présente Convention.

Article 21

La Convention ne s'applique, dans chaque Etat contractant, qu'aux époux qui se sont mariés ou qui désignent la loi applicable à leur régime matrimonial après son entrée en vigueur pour cet Etat.

Tout Etat contractant pourra, par déclaration, étendre l'application de la Convention à d'autres époux.

 

chapitre iv - clauses finales

Article 22

La Convention est ouverte à la signature des Etats qui étaient Membres de la Conférence de La Haye de droit international privé lors de sa Treizième session.

Elle sera ratifiée, acceptée ou approuvée et les instruments de ratification, d'acceptation ou d'approbation seront déposés auprès du Ministère des Affaires Etrangères des Pays-Bas.

Article 23

Tout autre Etat pourra adhérer à la Convention.

L'instrument d'adhésion sera déposé auprès du Ministère des Affaires Etrangères des Pays-Bas.

Article 24

Tout Etat, au moment de la signature, de la ratification, de l'acceptation, de l'approbation ou de l'adhésion, pourra déclarer que la Convention s'étendra à l'ensemble des territoires qu'il représente sur le plan international ou à l'un ou plusieurs d'entre eux. Cette déclaration aura effet au moment où elle entre en vigueur pour cet Etat.

Cette déclaration, ainsi que toute extension ultérieure, seront notifiées au Ministère des Affaires Etrangères des Pays-Bas.

Article 25

Un Etat contractant qui comprend deux ou plusieurs unités territoriales dans lesquelles des systèmes de droit différents s'appliquent en matière de régimes matrimoniaux pourra, au moment de la signature, de la ratification, de l'acceptation, de l'approbation ou de l'adhésion, déclarer que la Convention s'appliquera à toutes ses unités territoriales ou seulement à l'une ou à plusieurs d'entre elles, et pourra à tout moment étendre cette déclaration.

Ces déclarations seront notifiées au Ministère des Affaires Etrangères des Pays-Bas et indiqueront expressément l'unité territoriale à laquelle la Convention s'applique.

Article 26

Un Etat contractant qui connaît, à la date de l'entrée en vigueur de la Convention pour cet Etat, un système complexe d'allégeance nationale peut spécifier à tout moment, par déclaration, comment une référence à sa loi nationale doit être entendue aux fins de la Convention.

Article 27

Aucune réserve à la Convention n'est admise.

Article 28

Tout Etat contractant qui désire faire l'une des déclarations prévues aux articles 5, 9, alinéas 4, 21 et 26 la notifiera au Ministère des Affaires Etrangères des Pays-Bas.

Toute modification ou retrait d'une déclaration sera notifié de la même manière.

Article 29

La Convention entrera en vigueur le premier jour du troisième mois du calendrier après le dépôt du troisième instrument de ratification, d'acceptation, d'approbation ou d'adhésion prévu par les articles 22 et 23.

Par la suite, la Convention entrera en vigueur :

1. pour chaque Etat ratifiant, acceptant, approuvant ou adhérant postérieurement, le premier jour du troisième mois du calendrier après le dépôt de son instrument de ratification, d'acceptation, d'approbation ou d'adhésion ;
2. pour les territoires auxquels la Convention a été étendue conformément à l'article 24, le premier jour du troisième mois du calendrier après la notification visée dans cet article.

Article 30

La Convention aura une durée de cinq ans à partir de la date de son entrée en vigueur conformément à l'article 29, alinéa premier, même pour les Etats qui l'auront postérieurement ratifiée, acceptée ou approuvée, ou qui y auront adhéré.

La Convention sera renouvelée tacitement de cinq ans en cinq ans, sauf dénonciation.

La dénonciation sera, au moins six mois avant l'expiration du délai de cinq ans, notifiée au Ministère des Affaires Etrangères des Pays-Bas. Elle pourra se limiter à certains territoires ou unités territoriales auxquels s'applique la Convention.

La dénonciation n'aura d'effet qu'à l'égard de l'Etat qui l'aura notifiée. La Convention restera en vigueur pour les autres Etats contractants.

Article 31

Le Ministère des Affaires Etrangères des Pays-Bas notifiera aux Etats Membres de la Conférence, ainsi qu'aux Etats qui auront adhéré conformément aux dispositions de l'article 23 :

1. les signatures, ratifications, acceptations et approbations visées à l'article 22 ;
2. les adhésions visées à l'article 23 ;
3. la date à laquelle la Convention entrera en vigueur conformément aux dispositions de l'article 29 ;
4. les extensions visées à l'article 24 ;
5. les dénonciations visées à l'article 30 ;
6. les déclarations mentionnées aux articles 25, 26 et 28.

 

En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés, ont signé la présente Convention.

Fait à La Haye, le 14 mars 1978, en français et en anglais, les deux textes faisant également foi, en un seul exemplaire, qui sera déposé dans les archives du Gouvernement des Pays-Bas et dont une copie certifiée conforme sera remise, par la voie diplomatique, à chacun des Etats Membres de la Conférence de La Haye de droit international privé lors de sa Treizième session.