http://www.incadat.com/ ref.: HC/E/336 [25/01/2000; European Court of Human Rights; Superior Appellate Court] Ignaccolo-Zenide v. Romania, 25 January 2000, ECHR

PREMI�RE SECTION

 

 

AFFAIRE IGNACCOLO-ZENIDE c. ROUMANIE

(Requ�te n� 31679/96)

 

 

ARR�T

 

STRASBOURG

25 janvier 2000

 

En l�affaire Ignaccolo-Zenide c. Roumanie,

La Cour europ�enne des Droits de l�Homme (premi�re section), si�geant en une chambre compos�e de :

Mme E. Palm, pr�sidente,
MM. J. Casadevall,
Gaukur J�rundsson,
R. T�rmen,
Mme W. Thomassen,
M. R. Maruste, juges,
Mme
A. Diculescu-ŞOVA, juge ad hoc,

et de M. M. O�Boyle, greffier de section,

Apr�s en avoir d�lib�r� en chambre du conseil les 14 septembre 1999 et 11 janvier 2000,

Rend l�arr�t que voici, adopt� � cette derni�re date :

PROC�DURE

1.  L�affaire a �t� d�f�r�e � la Cour par le gouvernement roumain (� le Gouvernement �) le 27 janvier 1999, dans le d�lai de trois mois qu�ouvraient les anciens articles 32 � 1 et 47 de la Convention de sauvegarde des Droits de l�Homme et des Libert�s fondamentales (� la Convention �). A son origine se trouve une requ�te (no 31679/96) dirig�e contre la Roumanie et dont une ressortissante fran�aise, Mme Rita Ignaccolo-Zenide, avait saisi la Commission europ�enne des Droits de l�Homme (� la Commission �) le 22 janvier 1996 en vertu de l�ancien article 25.

La requ�te du Gouvernement renvoie aux anciens articles 44 et 48 ainsi qu�� la d�claration roumaine reconnaissant la juridiction obligatoire de la Cour (ancien article 46). Elle a pour objet d�obtenir une d�cision sur le point de savoir si les faits de la cause r�v�lent un manquement de l�Etat d�fendeur aux exigences de l�article 8 de la Convention.

2.  A la suite de l�entr�e en vigueur du Protocole n� 11 le 1er novembre 1998, et conform�ment � l�article 5 � 4 dudit Protocole, combin� avec les articles 100 � 1 et 24 � 6 du r�glement de la Cour (� le r�glement �), un coll�ge de la Grande Chambre a d�cid�, le 31 mars 1999, que l�affaire serait examin�e par une chambre constitu�e au sein de l�une des sections de la Cour.

3.  Conform�ment � l�article 52 � 1 du r�glement, le pr�sident de la Cour, M. L. Wildhaber, a ensuite attribu� l�affaire � la premi�re section. La chambre constitu�e au sein de ladite section comprenait de plein droit M. C. B�rsan, juge �lu au titre de la Roumanie (articles 27 � 2 de la Convention et 26 � 1 a) du r�glement), et Mme E. Palm, pr�sidente de la section (article 26 � 1 a) du r�glement). Ont en outre �t� d�sign�s par cette derni�re pour compl�ter la chambre M. J. Casadevall, M. Gaukur J�rundsson, Mme W. Thomassen et M. Maruste (article 26 � 1 b) du r�glement).

4.  Ult�rieurement, M. B�rsan, qui avait particip� � l�examen de l�affaire par la Commission, s�est d�port� (article 28 du r�glement). En cons�quence, le Gouvernement a d�sign� Mme Ana Diculescu-Şova pour si�ger en qualit� de juge ad hoc (articles 27 � 2 de la Convention et 29 � 1 du r�glement).

5.  Le repr�sentant de la requ�rante a pr�sent� son m�moire le 19 f�vrier 1999. Apr�s avoir b�n�fici� d�une prorogation de d�lai, l�agent du Gouvernement a soumis le sien le 5 juillet.

6.  Le 28 mai 1999, conform�ment � l�article 61 � 3 du r�glement, la pr�sidente a autoris� les associations AIRE Centre et Reunite � soumettre conjointement des observations �crites sur certains aspects de l�affaire. Ces observations ont �t� re�ues le 1er juillet 1999.

7.  Le 28 juillet 1999, le repr�sentant de la requ�rante a d�pos� des observations compl�mentaires. Le 30 juillet 1999, en vertu de l�article 61 � 5 du r�glement, le Gouvernement a formul� ses commentaires sur les observations des parties intervenantes.

8.  Ainsi qu�en avait d�cid� la chambre, une audience s�est d�roul�e en public le 14 septembre 1999, au Palais des Droits de l�Homme � Strasbourg.

Ont comparu :

pour le Gouvernement
MM. C.-L. Popescu, conseiller au minist�re de la Justice, agent,
M. Selegean, minist�re de la Justice,
T. C
orlăţean, minist�re des Affaires �trang�res, conseillers ;

pour la requ�rante
Me J. Lagrange, avocat au barreau de Nancy, conseil.

La Cour a entendu en leurs d�clarations Me Lagrange et M. Popescu.

EN FAIT

I. LES CIRCONSTANCES DE L�ESP�CE

9.  Le 7 mai 1980, la requ�rante �pousa D.Z., ressortissant roumain. Le couple eut deux enfants, Maud et Ad�le, n�es en 1981 et en 1984 respectivement.

10.  Par un jugement du 20 d�cembre 1989, le tribunal de grande instance de Bar-le-Duc pronon�a le divorce des �poux et homologua la convention conclue par eux pour r�gler les cons�quences de celui-ci et aux termes de laquelle l'autorit� parentale �tait confi�e au p�re, la requ�rante se voyant accorder un droit de visite et d'h�bergement.

11.  Dans le courant de l'ann�e 1990, D.Z. s'installa aux Etats-Unis avec ses filles.

12.  Le 3 septembre 1990, la requ�rante porta plainte contre lui pour non-repr�sentation d'enfant. Elle soutenait que, d�but septembre 1990, D.Z. n'avait pas respect� son droit de visite, d�s lors que, sans l�en informer, il avait gard� les enfants aux Etats-Unis au-del� de la moiti� des vacances scolaires.

13.  Le 4 septembre 1990, la requ�rante assigna D.Z. en r�f�r� devant le tribunal de grande instance de Metz, demandant � celui-ci de lui accorder l'autorit� parentale et la r�sidence des enfants et d'interdire � D.Z. de les sortir du territoire fran�ais sans son consentement.

14.  Par une ordonnance de r�f�r� rendue le 11 septembre 1990, le juge aux affaires matrimoniales du tribunal de grande instance de Metz rejeta la demande.

15.  Saisie par la requ�rante, la cour d'appel de Metz infirma ladite ordonnance par un arr�t du 28 mai 1991. Elle confia l'autorit� parentale aux deux parents, fixa la r�sidence des enfants chez la m�re et accorda au p�re un droit de visite et d'h�bergement.

16.  D.Z. ne se conforma pas � l'arr�t et ne pr�senta pas les enfants � leur m�re.

17.  Saisi par D.Z., qui r�sidait depuis plus d�un an au Texas, le tribunal du comt� de Harris de l�Etat du Texas annula l�arr�t de la cour d�appel de Metz par un jugement du 30 septembre 1991 et confia la garde des enfants au p�re. La requ�rante, qui n��tait ni pr�sente ni repr�sent�e devant ce tribunal, se vit accorder seulement un droit de visite. Apr�s avoir recueilli l�avis d�un psychologue selon lequel les enfants n�avaient pas de souvenir pr�cis de leur vie avec leur m�re avant la dissolution du mariage et �taient ravies de vivre avec leur p�re et leur belle-m�re, le tribunal avait consid�r� que les enfants �taient heureuses et s��taient bien int�gr�es au Texas, o� elles b�n�ficiaient d�une protection et d�une attention particuli�res de la part des autorit�s.

18.  En d�cembre 1991, D.Z. s�installa en Californie, avec ses deux enfants.

19.  Par une ordonnance du 24 f�vrier 1992, le juge d'instruction pr�s le tribunal de grande instance de Metz renvoya D.Z. en jugement du chef de non-repr�sentation d'enfant, infraction pr�vue par l'article 357 du code p�nal fran�ais. La requ�rante se constitua partie civile.

20.  Le 18 septembre 1992, le tribunal de grande instance de Metz rendit un jugement par d�faut condamnant D.Z. � une peine d'emprisonnement d'un an pour non-repr�sentation d'enfants et d�cernant � son encontre un mandat d'arr�t.

21.  Le mandat ne put �tre ex�cut�, D.Z. ne se trouvant pas sur le territoire fran�ais.

22.  A une date non pr�cis�e, D.Z. saisit la Cour de cassation d�un pourvoi contre l'arr�t rendu par la cour d'appel de Metz le 28 mai 1991.

23.  Rappelant le pouvoir souverain des juges du fond en mati�re d�appr�ciation de la valeur et de la port�e des preuves, la haute juridiction, par un arr�t du 25 novembre 1992, d�bouta l�int�ress� et le condamna � une amende civile de dix mille francs.

24.  La requ�rante, qui avait engag� aux Etats-Unis une proc�dure en reconnaissance et en ex�cution de l'arr�t du 28 mai 1991, obtint, entre 1993 et 1994, cinq jugements des tribunaux californiens ordonnant � D.Z. de lui restituer les enfants. Ainsi notamment, le 10 ao�t 1993, la Cour sup�rieure de l'Etat de Californie pronon�a l'exequatur de l'arr�t de la cour d'appel de Metz et enjoignit � D.Z. de rendre les enfants � leur m�re.

25.  Dans un rapport du 17 ao�t 1993, L.S., expert en psychologie de la famille agr�� aupr�s des tribunaux californiens, indiqua, � la suite d�un entretien avec les filles, que celles-ci ne d�siraient pas retourner vivre avec leur m�re, mais �taient heureuses avec leur p�re et sa nouvelle �pouse. Tandis que Maud ne paraissait pas �prouver de sentiments envers sa m�re, Ad�le indiqua � L.S. que sa m�re �tait � laide et m�chante � et qu�elle ne les aimait pas, mais d�sirait simplement les montrer aux autres et leur acheter des jouets.

26.  Par un arr�t du 1er f�vrier 1994, la cour d�appel de l�Etat de Californie jugea que le tribunal du comt� de Harris de l�Etat du Texas n��tait pas comp�tent pour r�former l�arr�t rendu par la cour d�appel de Metz le 28 mai 1991. Par un jugement du 29 avril 1994, la Cour sup�rieure de l'Etat de Californie confirma derechef l'arr�t de la cour d'appel de Metz en d�cidant que les enfants devaient r�sider avec la requ�rante et en jugeant ill�gale leur sortie de l'Etat de Californie sans autorisation expresse du tribunal.

27.  Les d�cisions californiennes ne furent pas appliqu�es par D.Z., qui, en mars 1994, quitta le territoire am�ricain et se rendit en Roumanie avec ses enfants.

28.  En juillet 1994, invoquant la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l'enl�vement international d'enfants (ci-apr�s � la Convention de La Haye �) la requ�rante saisit le minist�re de la Justice fran�ais, Autorit� centrale fran�aise au sens dudit instrument, d'une requ�te en vue du retour des enfants.

29.  En novembre 1994, l'Autorit� centrale des Etats-Unis demanda au minist�re de la Justice roumain, Autorit� centrale de la Roumanie, le retour des enfants en application des articles 3 et 5 de la Convention de La Haye.

30.  En d�cembre 1994, l'Autorit� centrale fran�aise demanda � l'Autorit� centrale roumaine le retour des enfants en application des articles 3 et 5 de la Convention de La Haye.

31.  Invoquant l�article 2 de la Convention de La Haye, la requ�rante d�posa le 8 d�cembre 1994 devant le tribunal de premi�re instance de Bucarest une demande en r�f�r� visant � obliger D.Z. � ex�cuter les d�cisions judiciaires ayant fix� chez elle la r�sidence des enfants et ordonn� leur restitution.

32.  Le tribunal pronon�a son jugement le 14 d�cembre 1994. Il releva d�abord que l�arr�t rendu par la cour d�appel de Metz le 28 mai 1991 fixait la r�sidence des enfants chez la requ�rante et que les jugements intervenus en Californie ordonnaient la restitution des enfants. Il nota ensuite que D.Z. avait enlev� ceux-ci en violation des d�cisions pr�cit�es et qu�il avait �t� condamn� � un an d'emprisonnement pour non-repr�sentation d'enfant. Il jugea que la demande en r�f�r� de la requ�rante remplissait la condition d�urgence, car le droit de l�int�ress�e pouvait �tre affect� d�une mani�re irr�parable en cas de retard. En outre, la mesure demand�e rev�tait un caract�re conservatoire, qui ne pr�jugeait pas le fond mais visait � assurer le respect du droit de la requ�rante, que tout retard aurait mis en danger. Enfin, l'apparence d�un droit exig�e pour l�admissibilit� de toute demande en r�f�r� �tait clairement �tablie. Au fond, le tribunal jugea qu'�taient applicables en l'esp�ce les dispositions de la Convention de La Haye, int�gr�e au droit roumain par l'effet de la loi n� 100/1992 concernant l'adh�sion de la Roumanie � cet instrument, et notamment son article 14, qui lui permettait de se fonder directement sur des d�cisions judiciaires rendues � l��tranger sans avoir recours � la proc�dure de l�exequatur. Par un jugement ex�cutoire sans sommation, il ordonna donc la restitution des enfants � la requ�rante.

33.  Ce jugement ne put �tre ex�cut�, D.Z. ayant cach� les enfants.

34.  En d�cembre 1994, D.Z. retira les enfants de l'�cole et les emmena dans un lieu inconnu.

35.  D.Z. releva appel du jugement du 14 d�cembre 1994. Le 9 juin 1995, le tribunal d�partemental de Bucarest renvoya l'affaire au 30 juin 1995 et ordonna l'audition des mineures.

36.  Le 30 juin 1995, en l�absence du repr�sentant du minist�re de la Justice, partie intervenante, et du conseil municipal du deuxi�me arrondissement de la ville de Bucarest, charg� de contr�ler et faire respecter les obligations des parents divorc�s, le tribunal renvoya l�affaire. Il fit aussi droit � la demande de suspension de l'ex�cution de la sentence jusqu'� l�issue de l'appel que lui avait pr�sent�e D.Z. Cette d�cision ne fut pas motiv�e.

37.  Le 23 ao�t 1995, le minist�re de la Justice demanda � la mairie de Bucarest d�effectuer une enqu�te sociale au domicile de D.Z.

38.  A une date non pr�cis�e, le maire de Bucarest informa le minist�re de la Justice qu�une enqu�te sociale avait �t� effectu�e en septembre 1995 par le conseil municipal du deuxi�me arrondissement de la ville de Bucarest. Le maire dudit arrondissement pr�senta les conclusions de cette enqu�te, sign�es par lui, par le secr�taire de mairie et par un inspecteur. Elles �taient ainsi libell�es :

� Les enfants Maud et Ad�le (...) habitent avec leur p�re et son �pouse dans une villa de 8 pi�ces, o� chacune des filles a sa propre chambre.

Leur p�re s�occupe tr�s bien d�elles, tant mat�riellement que moralement, en leur assurant les meilleures conditions d��ducation.

Il ressort des discussions men�es en roumain � langue qu�elles ma�trisent � avec les filles qu�elles sont intelligentes, sociables, � l�aise, qu�elles m�nent une vie normale, lisent, �crivent, et sont appliqu�es � l��cole.

Entre les mineures, leur p�re et son �pouse, il y a une atmosph�re d�entente et d�amiti� et beaucoup d�affection.

Elles ne d�sirent pas aller habiter en France avec leur m�re, dont elles se souviennent comme d�une personne froide et indiff�rente. Elles disent qu�elles ont toujours trouv� aupr�s de leur p�re compr�hension, chaleur et affection.

Elles sont tr�s impressionn�es par la Roumanie et par les Roumains, parmi lesquels elles se sont fait beaucoup d�amis. Pendant les vacances, elles sont all�es en province et s�y sont senties merveilleusement bien.

Invit�es � dire si elles d�sirent voir leur m�re o� aller habiter chez elle, elles ont r�pondu � non � d�une mani�re cat�gorique et ont insist� pour que toute d�cision devant �tre prise les concernant tienne compte de leurs d�sirs.

En conclusion, il nous para�t que les mineures Maud et Ad�le b�n�ficient en Roumanie des meilleures conditions d��ducation. �

39.  Par une d�cision du 1er septembre 1995, le tribunal d�partemental de Bucarest rejeta l'appel de D.Z. contre le jugement du 14 d�cembre 1994.

40.  D.Z. se pourvut devant la cour d�appel de Bucarest, qui, par un arr�t d�finitif du 14 mars 1996, d�clara le recours nul pour d�faut de motivation.

A. Opposition � l'ex�cution

41.  A une date non pr�cis�e, D.Z. forma une opposition � l'ex�cution (contestaţie la executare) de la d�cision du 14 d�cembre 1994. Apr�s avoir entendu les enfants, qui r�it�r�rent leur d�sir de rester avec leur p�re, le tribunal de premi�re instance de Bucarest rejeta l�opposition le 7 avril 1995.

42.  Saisi par D.Z. d�un recours contre la d�cision, le tribunal d�partemental de Bucarest la confirma le 9 f�vrier 1996.

B. Demande de transfert de l�autorit� parentale pr�sent�e au tribunal de premi�re instance de Bucarest

43.  Le 27 octobre 1995, D.Z. d�posa devant le tribunal de premi�re instance de Bucarest une requ�te tendant � l�obtention � titre exclusif de l�autorit� parentale. Il faisait valoir que depuis 1994 il habitait � Bucarest dans une villa spacieuse, offrant des conditions exceptionnelles aux enfants, qui ne d�siraient pas aller vivre avec leur m�re, cette derni�re faisant partie d�une secte.

Le tribunal, auquel D.Z. avait d�clar� que la requ�rante avait �lu domicile chez Ştefan Constantin, fit notifier la date de l�audience uniquement � ce dernier. Il ressort des documents dont dispose la Cour que ni � ce stade de la proc�dure ni plus tard la requ�rante ne fut inform�e de son assignation devant le tribunal de premi�re instance de Bucarest.

44.  Le 26 janvier 1996, sur demande du tribunal de premi�re instance de Bucarest, le conseil municipal du deuxi�me arrondissement de la ville de Bucarest effectua une enqu�te sociale. A la suite de celle-ci, le maire de la ville de Bucarest informa le tribunal que les filles �taient bien d�velopp�es, tant physiquement que sur le plan psychique, qu�elles menaient une vie normale, avaient des amis � l��cole et dans le voisinage et �taient tr�s attach�es � leur p�re et � son �pouse, qui s�occupaient tr�s bien d�elles et aupr�s de qui elles souhaitaient demeurer.

45.  Apr�s avoir tenu, le 8 et le 29 janvier 1996, deux audiences en l�absence de la requ�rante, et apr�s avoir entendu les enfants � huis clos le 16 janvier 1996, le tribunal rendit son jugement le 5 f�vrier 1996, �galement en l�absence de la requ�rante. Soulignant la primaut� de l�int�r�t des enfants et se fondant sur des documents �tablis par les enseignants des filles et attestant leurs bons r�sultats scolaires, sur une lettre du secr�tariat d�Etat pour les Cultes selon laquelle la secte dont aurait fait partie la requ�rante n��tait pas reconnue en Roumanie et sur l�enqu�te sociale r�alis�e par le conseil municipal de Bucarest, il fit droit � la demande de D.Z., estimant que celui-ci assurait les meilleures conditions de vie et d��ducation aux enfants, qu�il avait d�ailleurs �lev�es seul depuis le divorce.

46.  Le 16 octobre 1996, le tribunal d�partemental de Bucarest annula le jugement sur appel pour irr�gularit� de l�assignation de la requ�rante et renvoya l'affaire devant le tribunal de premi�re instance. Il releva que la requ�rante �tait domicili�e en France, qu�elle avait donn� � Ştefan Constantin une procuration sp�ciale pour la repr�senter dans un autre litige et que, d�s lors, en l�absence d�une procuration sp�ciale en l�esp�ce, sa comparution � l�audience aurait d� lui �tre notifi�e � son domicile en France.

47.  D.Z. contesta la d�cision au motif que la requ�rante avait donn� � Ştefan Constantin une procuration g�n�rale et que, donc, la notification des actes au domicile de celui-ci �tait r�guli�re.

48.  Par un arr�t du 9 avril 1997, rendu en l�absence de la requ�rante comme d�un repr�sentant de celle-ci, la cour d�appel de Bucarest accueillit le recours, au motif que Ştefan Constantin �tait le mandataire g�n�ral de la requ�rante. Elle annula la d�cision du 16 octobre 1996 et renvoya l�affaire devant le tribunal d�partemental pour un nouvel examen du recours.

49.  L�audience devant le tribunal d�partemental fut fix�e au 23 janvier 1998. Y assist�rent, selon le proc�s-verbal r�dig� � cette date, D.Z., son avocat, ainsi que l�assistant de Florea Constantin, l�avocat cens�, selon le tribunal, agir pour le compte de la requ�rante. La Cour ne peut d�terminer, � partir des documents qui lui ont �t� soumis, qui, de Florea ou de Ştefan Constantin, a �t� consid�r� par le tribunal ayant �t� mandat� par la requ�rante.

Faisant valoir que Florea Constantin �tait absent, l�assistant sollicita l�ajournement des d�bats. Le tribunal rejeta cette demande apr�s avoir entendu en ses conclusions l�avocat de D.Z. Il rendit sa d�cision le 30 janvier 1998, en l�absence de la requ�rante comme d�un repr�sentant de celle-ci. Sans �voquer la question de la repr�sentation de la requ�rante, il rejeta l�appel et confirma ainsi le jugement du 5 f�vrier 1996, relevant que les enfants d�siraient rester avec leur p�re, qui leur assurait les meilleures conditions de vie.

50.  Il appara�t qu�un recours a �t� form� au nom de la requ�rante contre la d�cision du 30 janvier 1998. Les documents soumis � la Cour ne permettent pas de d�terminer si c�est la requ�rante elle-m�me qui l�introduisit. Quoi qu�il en soit, la cour d�appel de Bucarest le rejeta pour d�faut de motivation par un arr�t du 28 mai 1998. Ainsi qu�il ressort de cette d�cision, qui ne fut soumise au greffe par le gouvernement d�fendeur que le 13 septembre 1999, seul D.Z. assista � l�audience du 28 mai 1998.

C. Demande de transfert de l�autorit� parentale pr�sent�e au tribunal de grande instance de Metz

51.  Par une requ�te du 5 janvier 1995, D.Z. sollicita du juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Metz le transfert de la r�sidence des enfants � son domicile et l'exercice exclusif de l'autorit� parentale.

52.  Apr�s de nombreux renvois, le tribunal statua par un jugement du 22 f�vrier 1996. Il jugea d'abord qu'il n'y avait pas lieu de tenir compte du jugement rendu le 5 f�vrier 1996 par le tribunal de premi�re instance de Bucarest, au motif que ce dernier n'�tait pas comp�tent pour statuer sur le fond du droit de garde des enfants, d�s lors que les juridictions roumaines ne pouvaient �tre saisies que d�une demande de retour des enfants en application de la Convention de La Haye. Le tribunal refusa ensuite d'entendre les deux enfants. Il constata que depuis 1991 D.Z. les avait emp�ch�es de voir leur m�re et qu'il les avait �lev�es dans un sentiment de haine � l'�gard de celle-ci. En effet, dans leurs lettres des 1er et 3 ao�t 1994 parlant de leur m�re, les filles avaient utilis� des termes comme � idiote �, � mon ex-m�re �, souhaitant que � sa maison ou son appartement prenne feu et qu'elle y soit � ce moment-l� �, termes que le tribunal jugea particuli�rement choquants, s'agissant d'enfants de dix et quatorze ans. Il conclut que l'intol�rance, l'intransigeance, la haine traduites dans ces lettres d�montraient � suffisance que l'�ducation re�ue par les enfants et le milieu dans lequel elles vivaient les privaient de tout discernement.

53.  Quant � la demande de transfert de r�sidence, le tribunal la rejeta dans les termes suivants :

� Attendu que le Juge aux Affaires Familiales statue en fonction de l'int�r�t des enfants pour d�terminer le lieu de leur r�sidence,

Attendu que la cour d'appel de Metz par arr�t du 28 mai 1991 avait estim� que l'int�r�t des enfants �tait de r�sider avec leur m�re, en France, leurs deux parents ayant opt� pour la nationalit� fran�aise, dans leur milieu lorrain d'origine,

Attendu que depuis cette date, la m�re n'a plus eu aucun contact avec ses enfants du fait du p�re,

Attendu que Madame Ignaccolo verse aux d�bats les divers proc�s-verbaux �tablis en Roumanie lors des tentatives d'ex�cution de la d�cision de retour, les courriers adress�s par le Minist�re de la Justice roumain au Bureau d'Entraide Judiciaire Internationale, d'o� il ressort que Monsieur Zenide cache les enfants, a acquis un chien qu'il a dress� pour attaquer toutes les personnes qui s'approchent des enfants, a retir� les enfants de l'�cole en d�cembre 1994 pour �viter leur localisation,

Attendu qu'il justifie son attitude par le fait que Madame Ignaccolo fait partie d'une secte et ne s'est pas occup�e des enfants pendant leur vie commune, que toutefois il ne d�montre nullement ses griefs, se contentant d'all�gations ou de t�moignages de personnes vivant aux Etats-Unis ou en Roumanie et ne connaissant pas personnellement la m�re des enfants,

Attendu que les capacit�s �ducatives d'un p�re qui nie totalement l'image de la m�re, qui maintient les enfants dans un sentiment de haine � l'�gard de leur m�re et ne leur permet m�me pas de se forger une opinion en leur laissant l'opportunit� de la rencontrer, qui n'a pas h�sit� pour �chapper � l'ex�cution des d�cisions judiciaires � d�raciner compl�tement et une deuxi�me fois les enfants pour aller s'installer dans un pays dont elles ne connaissent pas la langue, sont s�rieusement contestables,

Attendu que l'int�r�t des enfants dans une telle situation est intangible et ind�finissable, compte tenu d'une part de la pression et du conditionnement qu'elles subissent chez leur p�re et d'autre part de leur �loignement pendant cinq ans de leur m�re qu'elles ne connaissent plus,

Attendu que le d�sir exprim� par les enfants de rester vivre chez leur p�re tant dans leurs courriers que lors de leur audition par la juridiction roumaine ne peut d�terminer � lui seul l'int�r�t puisqu'il reviendrait � faire peser sur des enfants de 10 et 14 ans la responsabilit� de la fixation de leur r�sidence,

Attendu que Monsieur Zenide ne saurait faire ent�riner une situation de fait issue d'un coup de force au seul b�n�fice du temps �coul�, que d�s lors il y a lieu de le d�bouter purement et simplement de sa requ�te (...) �

D. Tentatives d'ex�cution de la d�cision du 14 d�cembre 1994

54.  Depuis 1994, la requ�rante s�est rendue huit fois en Roumanie dans l'espoir de rencontrer ses enfants.

55.  L'ex�cution de la d�cision du 14 d�cembre 1994 fut tent�e � plusieurs reprises, sans succ�s.

56.  Le 22 d�cembre 1994, un huissier de justice se rendit au domicile de D.Z., accompagn� par la requ�rante, son avocat, un serrurier et deux policiers. Seule O.Z., l��pouse de D.Z., et un chien de garde se trouvaient � la maison. O.Z., ressortissante fran�aise, indiqua qu�elle ne permettrait � l�huissier d�inspecter la maison que si un repr�sentant de l�ambassade de France �tait pr�sent. La requ�rante et son avocat se rendirent donc � l�ambassade de France, o� ils obtinrent que T., consul de France, et un interpr�te les suivent au domicile de D.Z.

57.  Pendant l�absence de la requ�rante, alors que les policiers et l�huissier de justice �taient toujours sur place, D.Z. et son oncle S.G. p�n�tr�rent dans la maison. Lorsque la requ�rante revint accompagn�e de T. et de l�interpr�te, O.Z. permit aux personnes pr�sentes, � l�exception de la requ�rante, de proc�der � une perquisition des lieux. Vu l�agressivit� du chien pr�sent, la perquisition dut se d�rouler � la h�te et les filles ne furent pas trouv�es. D.Z. resta invisible pendant cette v�rification.

58.  Le 23 d�cembre 1994, la requ�rante �crivit au ministre de la Justice roumain pour se plaindre de la mani�re dont les choses s��taient d�roul�es le 22 d�cembre. Elle invita le ministre � d�poser une plainte p�nale � l�encontre de O.Z. pour non-respect d�une d�cision judiciaire. Affirmant �tre sans nouvelles de ses filles, elle lui demanda �galement d�attaquer D.Z., O.Z. et S.G. au p�nal pour mauvais traitements inflig�s � des mineurs, s�questration et, le cas �ch�ant, homicide.

59.  Le 27 d�cembre 1994, un huissier de justice, la requ�rante, son avocat et deux agents de police se rendirent � nouveau au domicile de D.Z. N�ayant trouv� personne, ils s�adress�rent � une voisine, qui leur dit que D.Z. �tait parti avec les enfants le 22 d�cembre 1994. La d�l�gation se rendit alors au domicile de G.A., oncle de D.Z., chez qui D.Z. et les enfants habitaient parfois. Ils y trouv�rent G.A. et le m�me chien de garde. G.A. leur indiqua qu�il n�avait vu ni D.Z. ni les enfants depuis le 20 d�cembre 1994. Au sujet du chien, il expliqua � l�huissier que D.Z. l�avait achet� pour prot�ger ses filles.

60.  Par une lettre du 7 f�vrier 1995, le minist�re de la Justice fran�ais informa la requ�rante que le minist�re de la Justice roumain avait saisi le parquet comp�tent d�une plainte p�nale dirig�e contre D.Z.

61.  Par une lettre dat�e du 5 mai 1995, le minist�re de la Justice roumain informa le minist�re de la Justice fran�ais que de nombreuses d�marches avaient �t� faites aupr�s de la police pour localiser les enfants, mais qu�elles �taient rest�es sans r�sultat, D.Z. ayant retir� les enfants de l��cole. La lettre pr�cisait �galement que les autorit�s roumaines avaient d�pos� contre D.Z. une plainte p�nale pour mauvais traitements inflig�s � des mineurs. Enfin, le minist�re de la Justice roumain d�clarait reconna�tre que la mauvaise foi de D.Z. �tait manifeste et assurait qu�il continuerait � appuyer la requ�rante dans ses d�marches.

62.  Le 10 mai 1995, une d�l�gation compos�e de la requ�rante, de son avocat, d'un repr�sentant du minist�re de la Justice roumain, de deux huissiers de justice, de trois agents de police et d'un agent de l'ambassade de France � Bucarest se rendit au domicile de D.Z. Elle put inspecter la maison, mais n�y trouva pas les enfants. Lors de l�entretien, long de quatre heures, qui s�ensuivit, D.Z. affirma que les fillettes se trouvaient en Roumanie, mais refusa d�en dire plus. Il promit n�anmoins de les pr�senter au minist�re de la Justice le 11 mai 1995.

63.  Un rapport �tabli par l�ambassade de France � Bucarest au sujet de la visite du 10 mai 1995 indique :

� Contrairement � ce qui avait �t� annonc� par Mme F. [du minist�re de la Justice roumain] avant cette perquisition, D.Z. n�a pas �t� appr�hend� par les forces de police du fait de la non-restitution des enfants. Durant cette intervention, le parquet, avec lequel Mme F. �tait en liaison t�l�phonique, a reconsid�r� sa position en refusant que D.Z. soit amen�. Ce revirement est vraisemblablement d� � une intervention de Me G., avocat tr�s influent, pr�venu par son client, D.Z. [...] �

64.  Ni D.Z. ni les enfants ne vinrent au rendez-vous du 11 mai 1995.

65.  En cons�quence, D.Z. se vit remettre une convocation officielle � se pr�senter avec ses enfants au minist�re de la Justice le 15 mai 1995, en vue d'une audition des enfants en pr�sence de leur m�re. Le 15 mai 1995, seul Me G., avocat de D.Z., se rendit au minist�re et r�it�ra le refus de son client de pr�senter les enfants.

66.  Le 4 d�cembre 1995, une nouvelle tentative d�ex�cution fut entreprise. La requ�rante, son avocat et un huissier de justice se pr�sent�rent au domicile de D.Z. Seuls l�huissier de justice et l�avocat de la requ�rante se virent autoriser l�acc�s par les deux policiers du sixi�me arrondissement d�j� pr�sents sur place, la requ�rante �tant invit�e � rester dehors. Aux dires de D.Z. et des agents de police, les enfants n��taient pas dans la maison. L�huissier de justice se vit toutefois refuser la permission de v�rifier ces dires par lui-m�me. Un capitaine de police que ni les deux policiers ni l�huissier ne connaissaient arriva peu de temps apr�s et demanda � D.Z. de lui pr�senter les enfants le lendemain. D.Z. finit par accepter une proposition de l�avocat de la requ�rante l�invitant � pr�senter les enfants le lendemain � 10 h 30, au bureau des huissiers du tribunal de premi�re instance de Bucarest.

67.  Le 5 d�cembre 1995, l�huissier de justice, la requ�rante et son avocat attendirent D.Z. en vain. Un proc�s-verbal fut r�dig� � cette occasion.

68.  Par une lettre du 10 mai 1996, le ministre de la Justice fran�ais fit part � son homologue roumain des craintes de la requ�rante selon lesquelles les agents de police roumains tol�reraient les agissements de D.Z. Il lui demanda donc d'intervenir aupr�s des forces de police roumaines afin que ces derni�res missent tout en �uvre pour obtenir le retour des enfants aupr�s de leur m�re.

69.  Le 29 janvier 1997, la requ�rante rencontra ses filles pour la premi�re fois depuis sept ans. La rencontre dura dix minutes et se d�roula � Bucarest, dans la salle des professeurs de l'�tablissement scolaire des enfants, o� D.Z. �tait lui-m�me enseignant.

70.  Assist�rent � la rencontre un huissier de justice, deux hauts fonctionnaires du minist�re roumain de la Justice, le consul g�n�ral de France � Bucarest, deux officiers de la Direction g�n�rale de la police, le directeur et le directeur adjoint de l'�cole, ainsi que les deux ma�tres de classe des filles. Selon le proc�s-verbal r�dig� par l�huissier � cette occasion, la rencontre visait � convaincre les personnes pr�sentes du refus des filles de retourner aupr�s de leur m�re.

71.  Lorsqu'elle aper�ut la requ�rante, Maud tenta de s'enfuir et mena�a de se jeter par la fen�tre si elle �tait oblig�e d'avoir des relations avec sa m�re. S'ensuivit, hors la pr�sence de la requ�rante, une discussion au cours de laquelle Maud affirma que sa m�re leur avait menti et fait beaucoup de mal. Elle r�it�ra son d�sir de rester avec son p�re et de ne jamais revoir sa m�re.

72.  Quant � Ad�le, elle se mit � pleurer et cria � la requ�rante de s'en aller, en affirmant qu'elle ne voulait plus jamais la revoir. Son ma�tre de classe prit l'initiative de mettre fin � l'entrevue afin de ne pas choquer la mineure. Les filles ayant �t� �loign�es par les deux ma�tres de classe, la requ�rante affirma ne plus insister pour obtenir l�ex�cution de l�ordonnance du 14 d�cembre 1994 et demanda au directeur de l'�cole de la tenir au courant r�guli�rement des r�sultats scolaires de ses filles.

73.  Par une lettre du 31 janvier 1997, le minist�re de la Justice roumain, Autorit� centrale roumaine, informa le minist�re de la Justice fran�ais, Autorit� centrale fran�aise, de sa d�cision d�ordonner le non-retour des enfants. La d�cision �tait motiv�e par le refus obstin� des enfants de revoir leur m�re, tel qu�il �tait apparu lors de la rencontre du 29 janvier 1997.

74.  Par une lettre du 17 juin 1997, le minist�re de la Justice roumain communiqua � la requ�rante les moyennes scolaires obtenues par les filles pendant l'ann�e scolaire 1996-1997.

75.  Dans une lettre du 7 juillet 1997 adress�e au minist�re de la Justice roumain, la requ�rante se plaignit de ce que le directeur de l��cole n�avait pas honor� sa promesse de la tenir r�guli�rement au courant des r�sultats scolaires de ses filles et exprima sa d�ception devant la pauvret� des informations fournies le 17 juin 1997. Enfin, elle d�clara ne pouvoir accepter une telle � fac�tie �.

II. LE DROIT et la pratique INTERNEs PERTINENTs

A. La Constitution

76.  Les dispositions pertinentes de la Constitution de 1991 se lisent comme suit :

Article 11(2)

� Les trait�s ratifi�s par le Parlement selon les voies l�gales font partie int�grante de l�ordre juridique interne. �

Article 20

� (1) Les dispositions constitutionnelles concernant les droits et libert�s des citoyens seront interpr�t�es et appliqu�es en concordance avec la D�claration universelle des Droits de l�Homme et les pactes et autres trait�s auxquels la Roumanie est partie.

(2) En cas de contradiction entre les pactes et trait�s concernant les droits fondamentaux de l�homme auxquels la Roumanie est partie et les lois internes, les dispositions internationales pr�vaudront. �

B. La Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l�enl�vement international des enfants

77.  Les dispositions pertinentes de la Convention de La Haye sont ainsi libell�es :

Article 7

� Les Autorit�s centrales doivent coop�rer entre elles et promouvoir une collaboration entre les autorit�s comp�tentes dans leurs Etats respectifs, pour assurer le retour imm�diat des enfants et r�aliser les autres objectifs de la pr�sente Convention.

En particulier, soit directement, soit avec le concours de tout interm�diaire, elles doivent prendre toutes les mesures appropri�es :

a.  pour localiser un enfant d�plac� ou retenu illicitement ;

b.  pour pr�venir de nouveaux dangers pour l�enfant ou des pr�judices pour les parties concern�es, en prenant ou faisant prendre des mesures provisoires ;

c.  pour assurer la remise volontaire de l�enfant ou faciliter une solution amiable ;

d.  pour �changer, si cela s�av�re utile, des informations relatives � la situation sociale de l�enfant ;

e.  pour fournir des informations g�n�rales concernant le droit de leur Etat relatives � l�application de la Convention ;

f.  pour introduire ou favoriser l�ouverture d�une proc�dure judiciaire ou administrative, afin d�obtenir le retour de l�enfant et, le cas �ch�ant, de permettre l�organisation ou l�exercice effectif du droit de visite ;

g.  pour accorder ou faciliter, le cas �ch�ant, l�obtention de l�assistance judiciaire et juridique, y compris la participation d�un avocat ;

h.  pour assurer, sur le plan administratif, si n�cessaire et opportun, le retour sans danger de l�enfant ;

i.  pour se tenir mutuellement inform�es sur le fonctionnement de la Convention et, autant que possible, lever les obstacles �ventuellement rencontr�s lors de son application. �

Article 11

� Les autorit�s judiciaires ou administratives de tout Etat contractant doivent proc�der d�urgence en vue du retour de l�enfant.

Lorsque l�autorit� judiciaire ou administrative saisie n�a pas statu� dans un d�lai de six semaines � partir de sa saisine, le demandeur ou l�Autorit� centrale de l�Etat requis, de sa propre initiative ou sur requ�te de l�Autorit� centrale de l�Etat requ�rant, peut demander une d�claration sur les raisons de ce retard.

(...) �

C. Le code de la famille

78.  L�article 108 du code de la famille dispose :

� L�autorit� de tutelle (autoritatea tutelară) doit exercer un contr�le effectif et continu sur la mani�re dont les parents s�acquittent de leurs obligations concernant la personne et les biens de l�enfant.

Les d�l�gu�s de l�autorit� de tutelle ont le droit de visiter les enfants chez eux et de se renseigner par tous les moyens sur la mani�re dont les personnes qui en ont la charge s�occupent d�eux, sur leur sant� et leur d�veloppement physique, leur �ducation (...) ; au besoin, ils donnent les instructions n�cessaires. �

D. Le code p�nal

79.  L�article 307 du code p�nal �nonce :

� La r�tention de l�enfant mineur par l�un de ses parents sans l�autorisation de l�autre parent (...) sous l�autorit� duquel se trouve l�enfant conform�ment � la loi est sanctionn�e par une peine de un � trois mois d�emprisonnement ou par une amende.

Est passible de la m�me peine la personne � qui l�autorit� parentale a �t� d�volue par d�cision judiciaire et qui, de mani�re r�p�titive, emp�che un des parents d�avoir des relations personnelles avec l�enfant mineur dans les conditions �tablies par les parties ou par l�organisme comp�tent.

Les poursuites ne peuvent �tre d�clench�es que si une plainte p�nale a pr�alablement �t� d�pos�e par la victime.

La r�conciliation des parties supprime la responsabilit� p�nale. �

E. Le code de proc�dure p�nale

80.  Les dispositions pertinentes du code de proc�dure p�nale se lisent comme suit :

Article 279

� En ce qui concerne les infractions pour lesquelles la loi pr�voit la n�cessit� d�une plainte p�nale pr�alable, l�ouverture des poursuites ne peut avoir lieu qu�� la suite d�une plainte de la victime.

La plainte pr�alable est d�pos�e :

(...)

b) aupr�s de l�organe charg� des enqu�tes p�nales ou aupr�s du procureur, pour les autres infractions que celles pr�vues � l�alin�a a) (...) �

Article 284

� Lorsque la loi exige une plainte p�nale pr�alable, celle-ci doit �tre d�pos�e dans un d�lai de deux mois � compter du jour o� la victime a su l�identit� de l�auteur de l�infraction (...) �

Article 285

� La plainte pr�alable d�pos�e irr�guli�rement aupr�s du parquet ou du tribunal sera transmise � l�organe comp�tent. Dans ce cas, elle sera consid�r�e comme valable si elle a �t� d�pos�e aupr�s de l�organe incomp�tent dans le d�lai exig� par la loi. �

F. Le code de proc�dure civile

81.  Les dispositions pertinentes du code de proc�dure civile sont ainsi libell�es : 

Article 67

� Les parties peuvent exercer leurs droits proc�duraux personnellement ou par l�interm�diaire d�un mandataire.

Le mandataire ayant une procuration g�n�rale ne peut repr�senter son mandant devant un tribunal que si ce droit lui a �t� accord� express�ment.

Si celui qui a donn� la procuration g�n�rale n�a pas son domicile ou sa r�sidence en Roumanie (...) il est pr�sum� avoir donn� aussi le droit de le repr�senter devant un tribunal. �

Article 87

� (...)

8. Sauf disposition contraire figurant dans un trait�, une convention internationale ou une loi sp�ciale, ceux qui se trouvent � l��tranger et dont le domicile ou la r�sidence � l��tranger sont connus sont cit�s � compara�tre par une notification recommand�e (...)

Dans tous les cas o� ceux qui se trouvent � l��tranger ont un mandataire connu en Roumanie, celui-ci est cit� (...) �

Article 107

� A peine de nullit�, le pr�sident reporte l�affaire chaque fois qu�il constate que la partie absente ne s�est pas vu notifier la comparution r�guli�rement. �

G. Loi n� 142 du 24 juillet 1997 portant modification de la loi sur l�organisation judiciaire

82.  Les dispositions pertinentes de la loi n� 142 du 24 juillet 1997 portant modification de la loi n� 92/1992 sur l�organisation judiciaire �noncent :

Article 30

� Le minist�re public exerce ses attributions par l�interm�diaire des procureurs constitu�s en parquets aupr�s de chaque tribunal, sous l�autorit� du ministre de la Justice.

L�activit� du minist�re public est organis�e selon les principes de l�galit�, d�impartialit� et de contr�le hi�rarchique.

(...) �

Article 31 i)

� Le minist�re public a les attributions suivantes :

(...)

la d�fense des droits et int�r�ts des mineurs et interdits (...) �

Article 38

� Le ministre de la Justice exerce le contr�le sur tous les procureurs, par le truchement des procureurs inspecteurs du parquet plac�s aupr�s de la Cour supr�me de justice et des cours d�appel ou par le truchement d�autres procureurs d�l�gu�s.

Lorsqu�il le juge n�cessaire, le ministre de la Justice, d�office ou sur demande du Conseil sup�rieur de la magistrature, exerce son contr�le par le truchement des inspecteurs g�n�raux ou des procureurs d�tach�s (...)

(...)

Le ministre de la Justice peut demander au procureur g�n�ral de la Cour supr�me de justice des informations sur l�activit� des parquets et peut donner des conseils quant aux mesures � prendre pour lutter contre la criminalit�.

Le ministre de la Justice a le droit de donner, soit directement soit par l�interm�diaire du procureur g�n�ral, des instructions �crites au procureur comp�tent afin que celui-ci proc�de, conform�ment � la loi, � l�ouverture de poursuites p�nales concernant des infractions dont il a connaissance ; il peut par ailleurs fair exercer devant les tribunaux les actions et voies de recours n�cessaires � la protection de l�int�r�t public. (...) �

H. Pratique concernant la notification de l�assignation � compara�tre

83.  Dans sa d�cision n� 87 rendue en 1993, la Cour supr�me de justice confirma sa jurisprudence constante en mati�re d�assignation des personnes habitant � l��tranger, qui oblige � citer au domicile � l��tranger, mais aussi, le cas �ch�ant, au domicile roumain du mandataire.

La doctrine, de son c�t�, met en �vidence le caract�re obligatoire de la citation, � son domicile � l��tranger, de la personne concern�e, m�me lorsque celle-ci a un mandataire en Roumanie (Viorel Mihai Ciobanu, Trait� th�orique et pratique de proc�dure civile, tome II, p. 94, Bucarest, 1997).

84.  Selon une jurisprudence constante, les tribunaux consid�rent que les dispositions l�gales concernant l�assignation � compara�tre sont imp�ratives, car elles visent � faire respecter le principe du contradictoire et les droits de la d�fense. Le non-respect de ces dispositions entra�ne la nullit� de la d�cision ainsi prononc�e, sa cassation et son renvoi devant le juge du fond (tribunal d�partemental de Bucarest, troisi�me chambre civile, d�cision n� 226/1990, in Recueil de jurisprudence civile du tribunal d�partemental de Bucarest, n� 155, p. 123, Bucarest, 1992 ; Cour supr�me de justice, chambre civile, d�cision n� 779 du 6 avril 1993, in Bulletin de jurisprudence de la Cour supr�me de justice pour 1993, p. 126, Bucarest, 1994).

proc�dure devant la commission

85.  Mme Ignaccolo-Zenide a saisi la Commission le 22 janvier 1996. Elle all�guait qu�au m�pris de l�article 8 de la Convention, qui garantit le respect de son droit au respect de sa vie familiale, les autorit�s roumaines n�avaient pas mis en �uvre les mesures propres � assurer l�ex�cution des d�cisions judiciaires ayant partag� la garde des enfants entre elle-m�me et son ex-�poux et ayant fix� leur r�sidence chez elle.

86.  La Commission a retenu la requ�te (no 31679/96) le 2 juillet 1997. Dans son rapport du 9 septembre 1998 (ancien article 31 de la Convention), elle conclut � la violation de l�article 8 (unanimit�).

CONCLUSIONS PR�SENT�ES � LA COUR

87.  Dans son m�moire, le Gouvernement invite la Cour � constater qu�il s�est conform� aux obligations positives lui incombant en vertu de l�article 8 de la Convention et que, par cons�quent, il n�y a pas eu violation de cette clause.

88.  De son c�t�, la requ�rante prie la Cour de dire qu�il y a eu violation de l�article 8 de la Convention et de lui allouer une satisfaction �quitable au titre de l�article 41.

EN DROIT

i. Sur la violation all�gu�e de l�article 8 de la Convention

89.  La requ�rante all�gue que les autorit�s roumaines n�ont pas pris les mesures ad�quates pour assurer l�ex�cution rapide des d�cisions de justice rendues en l�esp�ce et favoriser le retour de ses filles aupr�s d�elle. Lesdites autorit�s auraient ainsi viol� l�article 8 de la Convention, dont voici le texte :

� 1.  Toute personne a droit au respect de sa vie priv�e et familiale, de son domicile et de sa correspondance.

2.  Il ne peut y avoir ing�rence d�une autorit� publique dans l�exercice de ce droit que pour autant que cette ing�rence est pr�vue par la loi et qu�elle constitue une mesure qui, dans une soci�t� d�mocratique, est n�cessaire � la s�curit� nationale, � la s�ret� publique, au bien-�tre �conomique du pays, � la d�fense de l�ordre et � la pr�vention des infractions p�nales, � la protection de la sant� ou de la morale, ou � la protection des droits et libert�s d�autrui. �

90.  La requ�rante d�nonce en particulier le manque de s�rieux des tentatives entreprises pour faire ex�cuter l�ordonnance du 14 d�cembre 1994, qu�elle qualifie de � simulacres �, et souligne qu�aucune d�marche n�a �t� accomplie pour retrouver ses filles, cach�es par leur p�re avant chaque arriv�e de l�huissier de justice. Quant � la rencontre organis�e par les autorit�s le 29 janvier 1997, elle estime que, compte tenu des circonstances l�ayant entour�e, il ne s�agit l� que d�un simulacre de plus. Elle reproche aussi aux autorit�s roumaines leur inactivit� totale entre d�cembre 1995 et janvier 1997.

91.  Le Gouvernement soutient que les autorit�s en question ont entrepris des d�marches ad�quates et suffisantes pour faire ex�cuter l�ordonnance du 14 d�cembre 1994, par exemple en faisant assister l�huissier de justice par des policiers ou en convoquant le p�re des enfants au minist�re de la Justice. Il souligne que si ladite d�cision n�a pas �t� ex�cut�e cela est d�, d�une part, � son non-respect par le p�re, dont l�attitude ne saurait engager la responsabilit� du Gouvernement, et, d�autre part, au refus des enfants d�aller vivre avec la requ�rante, chose que l�on ne saurait davantage reprocher au Gouvernement.

92.  Pour la Commission, les autorit�s nationales ont n�glig� de d�ployer les efforts auxquels on pouvait normalement s�attendre pour faire respecter les droits de la requ�rante, portant ainsi atteinte � son droit au respect de sa vie familiale garanti par l�article 8 de la Convention.

93.  La Cour note en premier lieu qu�il n�est pas contest� en l�esp�ce que le lien entre la requ�rante et ses enfants rel�ve d�une vie familiale au sens de ladite disposition.

94.  Il s�agit d�s lors de d�terminer s�il y a eu manque de respect pour la vie familiale de la requ�rante. La Cour rappelle que si l�article 8 de la Convention tend pour l�essentiel � pr�munir l�individu contre des ing�rences arbitraires des pouvoirs publics il engendre de surcro�t des obligations positives inh�rentes � un � respect � effectif de la vie familiale. Dans un cas comme dans l�autre, il faut avoir �gard au juste �quilibre � m�nager entre les int�r�ts concurrents de l�individu et de la soci�t� dans son ensemble ; de m�me, dans les deux hypoth�ses, l�Etat jouit d�une certaine marge d�appr�ciation (arr�t Keegan c. Irlande du 26 mai 1994, s�rie A n� 290, p. 19, � 49).

S�agissant de l�obligation pour l�Etat d�arr�ter des mesures positives, la Cour n�a cess� de dire que l�article 8 implique le droit d�un parent � des mesures propres � le r�unir � son enfant et l�obligation pour les autorit�s nationales de les prendre (voir, par exemple, les arr�ts Eriksson c. Su�de du 22 juin 1989, s�rie A n� 156, pp. 26-27, � 71, Margareta et Roger Andersson c. Su�de du 25 f�vrier 1992, s�rie A n� 226-A, p. 30, � 91, Olsson c. Su�de (n� 2) du 27 novembre 1992, s�rie A n� 250, pp. 35-36, � 90, et Hokkanen c. Finlande du 23 septembre 1994, s�rie A n� 299-A).

Toutefois, l�obligation pour les autorit�s nationales de prendre des mesures � cet effet n�est pas absolue, car il arrive que la r�union d�un parent � ses enfants vivant depuis un certain temps avec l�autre parent ne puisse avoir lieu imm�diatement et requi�re des pr�paratifs. La nature et l��tendue de ceux-ci d�pendent des circonstances de chaque esp�ce, mais la compr�hension et la coop�ration de l�ensemble des personnes concern�es en constituent toujours un facteur important. Si les autorit�s nationales doivent s��vertuer � faciliter pareille collaboration, une obligation pour elles de recourir � la coercition en la mati�re ne saurait �tre que limit�e : il leur faut tenir compte des int�r�ts et des droits et libert�s de ces m�mes personnes, et notamment des int�r�ts sup�rieurs de l�enfant et des droits que lui reconna�t l�article 8 de la Convention. Dans l�hypoth�se o� des contacts avec les parents risquent de menacer ces int�r�ts ou de porter atteinte � ces droits, il revient aux autorit�s nationales de veiller � un juste �quilibre entre eux (arr�t Hokkanen pr�cit�, p. 22, � 58).

95.  Enfin, la Cour estime que les obligations positives que l�article 8 de la Convention fait peser sur les Etats contractants en mati�re de r�union d�un parent � ses enfants doivent s�interpr�ter � la lumi�re de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l�enl�vement international des enfants (� la Convention de La Haye �). Il en va d�autant plus ainsi en l�esp�ce que l�Etat d�fendeur est �galement partie � cet instrument, dont l�article 7 dresse une liste de mesures � prendre par les Etats pour assurer le retour imm�diat des enfants.

96.  Le point d�cisif en l�esp�ce consiste donc � savoir si les autorit�s nationales ont pris, pour faciliter l�ex�cution de l�ordonnance du 14 d�cembre 1994, toutes les mesures que l�on pouvait raisonnablement exiger d�elles (arr�t Hokkanen, ibidem).

1. Sur la p�riode � prendre en consid�ration

97.  Le Gouvernement soutient que son obligation de prendre des mesures pour faciliter le regroupement de la requ�rante et de ses enfants est n�e de l�ordonnance rendue en r�f�r� le 14 d�cembre 1994 par le tribunal de premi�re instance de Bucarest et a pris fin avec la d�cision irr�vocable du 28 mai 1998 par laquelle la cour d�appel de Bucarest a confi� l�autorit� parentale � D.Z.

98.  La requ�rante conteste la th�se du Gouvernement et fait valoir que la d�cision du 28 mai 1998 n�a jamais �t� port�e � sa connaissance et qu�elle en ignore la teneur. Elle nie de plus avoir nomm� un mandataire pour la repr�senter dans la proc�dure ayant abouti � la d�cision susmentionn�e et estime que, d�s lors qu�elle n�a pas �t� partie � l�instance, la d�cision en question a �t� rendue au m�pris du principe du contradictoire et ne saurait lui �tre oppos�e. Elle conteste enfin que les tribunaux roumains fussent comp�tents pour prendre une d�cision sur le fond quant � l�autorit� parentale et fait valoir que, selon l�article 16 de la Convention de La Haye, la comp�tence exclusive en la mati�re appartient aux tribunaux fran�ais. Elle souligne � cet �gard que les tribunaux roumains ont �t� saisis par D.Z. d�une action en modification des modalit�s d�exercice de l�autorit� parentale alors qu�une action identique �tait d�j� pendante devant les tribunaux fran�ais, toujours � l�initiative de D.Z.

99.  La Cour doit donc d�terminer si l�obligation pour les autorit�s de prendre des mesures afin de faciliter l�ex�cution de l�ordonnance du 14 d�cembre 1994 s�est �teinte � la suite de l�arr�t du 28 mai 1998 confiant l�autorit� parentale � D.Z.

La Cour rappelle que, dans son arr�t McMichael c. Royaume-Uni du 24 f�vrier 1995 (s�rie A n� 307-B, p. 55, � 87), elle a jug� que, bien que l�article 8 ne renferme aucune condition explicite de proc�dure, il faut � que le processus d�cisionnel d�bouchant sur des mesures d�ing�rence soit �quitable et respecte comme il se doit les int�r�ts prot�g�s par l�article 8 :

� Il �chet (...) de d�terminer, en fonction des circonstances de chaque esp�ce et notamment de la gravit� des mesures � prendre, si les parents ont pu jouer dans le processus d�cisionnel, consid�r� comme un tout, un r�le assez grand pour leur accorder la protection requise de leurs int�r�ts. Dans la n�gative, il y a manquement au respect de leur vie familiale et l�ing�rence r�sultant de la d�cision ne saurait passer pour � n�cessaire � au sens de l�article 8 (arr�t W. c. Royaume-Uni du 8 juillet 1987, s�rie A n� 121-A, pp. 28 et 29, �� 62 et 64). �

La Cour rel�ve d�abord que ni la requ�rante ni un repr�sentant de celle-ci n�assist�rent au prononc� de l�arr�t de la cour d�appel de Bucarest du 28 mai 1998, lequel ne fut pas non plus notifi� � l�int�ress�e. Ce n�est que le 13 septembre 1999, lorsque le gouvernement d�fendeur le soumit � la Cour, que la requ�rante put prendre connaissance de l�arr�t en question. D�autre part, la requ�rante n�a comparu � aucune des audiences organis�es dans le cadre de la proc�dure qui a abouti � la d�cision en cause. Il ressort des documents produits par le Gouvernement que, contrairement � ce qu�exige l�article 87 (8) du code de proc�dure civile roumain, aucune assignation � compara�tre n�a �t� notifi�e � la requ�rante � son domicile en France, alors que celui-ci �tait connu.

En ce qui concerne la notification adress�e � Ştefan Constantin, la Cour rel�ve qu�elle ne rempla�ait pas la notification � la requ�rante exig�e par l�article 87 in fine du code de proc�dure civile et par la jurisprudence constante des tribunaux internes (paragraphe 83 ci-dessus).

100.  Au vu de ces circonstances, la Cour estime que la proc�dure ayant abouti � la d�cision de la cour d�appel de Bucarest ne remplissait pas les exigences de proc�dure contenues dans l�article 8 de la Convention. En cons�quence, elle ne peut consid�rer que la d�cision susmentionn�e a mis fin aux obligations positives incombant au gouvernement en vertu de l�article 8.

2. Sur la mise en �uvre des droits de la requ�rante � l�autorit� parentale et au retour des enfants

101.  La Cour doit donc d�terminer si les autorit�s nationales ont pris les mesures n�cessaires et ad�quates pour faciliter l�ex�cution de l�ordonnance du 14 d�cembre 1994.

102.  Dans une affaire de ce genre, l�ad�quation d�une mesure se juge � la rapidit� de sa mise en �uvre. En effet, les proc�dures relatives � l�attribution de l�autorit� parentale, y compris l�ex�cution de la d�cision rendue � leur issue, exigent un traitement urgent, car le passage du temps peut avoir des cons�quences irr�m�diables sur les relations entre les enfants et celui des parents qui ne vit pas avec eux. En l�esp�ce, il en va d�autant plus ainsi que l�action introduite par la requ�rante est une action en r�f�r�. Or, l�essence d�une telle action est de pr�munir l�individu contre tout pr�judice pouvant r�sulter du simple �coulement du temps.

La Cour rel�ve que la Convention de La Haye exige, en son article 11, que les autorit�s judiciaires ou administratives saisies proc�dent d�urgence en vue du retour de l�enfant, toute inaction au-del� de six semaines pouvant donner lieu � une demande de motivation.

103.  En l�esp�ce, les huissiers de justice se d�plac�rent � quatre reprises au domicile de D.Z. entre d�cembre 1994 et d�cembre 1995. Si les premi�res tentatives d�ex�cution eurent lieu imm�diatement apr�s l�ordonnance du 14 d�cembre 1994, � savoir les 22 et 27 d�cembre 1994, la Cour ne peut pas en dire autant des tentatives ult�rieures : le troisi�me d�placement des huissiers n�eut lieu que plus de quatre mois plus tard, le 10 mai 1995, tandis que le quatri�me intervint le 4 d�cembre 1995.

La Cour note qu�aucune explication satisfaisante n�a �t� avanc�e pour justifier ces d�lais. De m�me, elle a du mal � apercevoir les motifs sur lesquels le tribunal d�partemental de Bucarest s�est fond� pour d�cider de suspendre l�ex�cution de l�ordonnance entre le 30 juin et le 1er septembre 1995.

104.  De surcro�t, la Cour rel�ve une inactivit� totale des autorit�s roumaines pendant plus d�un an, soit � partir de d�cembre 1995 et jusqu�au 29 janvier 1997, date � laquelle eut lieu la seule rencontre entre la requ�rante et ses enfants. Aucune explication n�a �t� fournie par le gouvernement d�fendeur � cet �gard.

105.  Pour le reste, elle observe qu�aucune autre mesure n�a �t� prise par les autorit�s pour cr�er les conditions n�cessaires � l�ex�cution de l�ordonnance litigieuse, qu�il s�agisse de mesures coercitives � l�encontre de D.Z. ou de mesures pr�paratoires en vue du retour des enfants.

106.  Si des mesures coercitives � l��gard des enfants ne sont pas souhaitables dans ce domaine d�licat, le recours � des sanctions ne doit pas �tre �cart� en cas de comportement ill�gal du parent avec lequel vivent les enfants.

107.  Le Gouvernement all�gue que de telles mesures n�auraient pu �tre adopt�es qu�� l�initiative de la requ�rante. Or celle-ci n�aurait entrepris aucune d�marche en ce sens. Elle aurait pu notamment, en vertu de l�article 1075 du code civil, saisir un tribunal civil d�une action en fixation d�une astreinte pour chaque jour de retard dans l�ex�cution de l�ordonnance du 14 d�cembre 1994, ou d�poser aupr�s des organes comp�tents une plainte p�nale pour non-respect des mesures en mati�re d�autorit� parentale.

108.  La Cour n�est pas appel�e � examiner si l�ordre juridique interne permettait l�adoption de sanctions efficaces � l�encontre de D.Z. En effet, il appartient � chaque Etat contractant de se doter d�un arsenal juridique ad�quat et suffisant pour assurer le respect des obligations positives qui lui incombent en vertu de l�article 8 de la Convention. La Cour a uniquement pour t�che d�examiner si, en l�esp�ce, les mesures adopt�es par les autorit�s roumaines �taient ad�quates et suffisantes.

109.  Elle note � cet �gard que l�omission par D.Z. de se rendre au minist�re de la Justice les 11 et 15 mai 1995 comme il y avait �t� invit� n�entra�na pour lui aucune cons�quence. De m�me, les autorit�s roumaines ne lui inflig�rent aucune sanction � la suite de son refus de pr�senter les enfants aux huissiers de justice. Au surplus, elles ne prirent aucune initiative pour tenter de localiser les enfants.

110.  Quant � l�absence all�gu�e d�une plainte p�nale, n�cessaire pour d�clencher des poursuites � l�encontre de D.Z., la Cour rel�ve que, dans une lettre du 23 d�cembre 1994, la requ�rante indiquait au ministre de la Justice qu�elle d�sirait d�poser une plainte p�nale � l�encontre de D.Z., et, apr�s avoir pr�cis� les motifs de cette plainte, lui demandait de faire le n�cessaire. Or aucune suite ne fut donn�e � cette lettre.

La Cour observe que, d�apr�s les articles 30 et 38 de la loi portant modification de la loi sur l�organisation judiciaire, le parquet exerce son activit� sous l�autorit� du ministre de la Justice, lequel a le pouvoir de donner des instructions aux procureurs. Dans ces conditions, elle juge inop�rant l�argument du gouvernement d�fendeur selon lequel la requ�rante n�a pas d�pos� une plainte p�nale aupr�s de l�organe comp�tent.

111.  Par ailleurs, dans la mesure o� le Gouvernement reproche � la requ�rante de ne pas avoir introduit une action en fixation d�une astreinte, la Cour estime qu�une telle action ne saurait passer pour suffisante, car il s�agit l� d�une voie indirecte et exceptionnelle d�ex�cution. De surcro�t, l�inaction de la requ�rante ne pouvait relever les autorit�s des obligations leur incombant, en tant que d�positaires de la force publique, en mati�re d�ex�cution.

112.  En outre, aucun contact pr�paratoire entre les services sociaux, la requ�rante et les enfants ne fut organis� par les autorit�s, qui ne sollicit�rent pas davantage le concours de p�dopsychiatres ou de psychologues (voir, mutatis mutandis, l�arr�t Olsson pr�cit�, pp. 35-36, �� 89-91). Ainsi, les services sociaux, auxquels l�article 108 du code de la famille conf�rait pourtant des pouvoirs suffisants en la mati�re, ne rencontr�rent les enfants qu�� l�occasion de la proc�dure en transfert de l�autorit� parentale (paragraphe 44 ci-dessus) et se born�rent � effectuer des enqu�tes purement descriptives.

Hormis celle du 29 janvier 1997, aucune rencontre entre la requ�rante et ses enfants ne fut organis�e par les autorit�s, alors que l�int�ress�e s�est d�plac�e en Roumanie � huit reprises dans l�espoir de les voir. Quant � la rencontre du 29 janvier 1997, qui, la Cour le souligne, eut lieu un an apr�s l�introduction de la pr�sente requ�te devant la Commission et deux ans apr�s l�ordonnance de r�f�r� du 14 d�cembre 1994, elle ne fut pas organis�e, selon la Cour, dans des conditions propres � favoriser un d�veloppement positif des relations entre la requ�rante et ses enfants. Elle se d�roula dans l��tablissement scolaire des enfants, o� leur p�re �tait enseignant, et en pr�sence d�une d�l�gation nombreuse compos�e d�enseignants, de fonctionnaires, de diplomates, de policiers, de la requ�rante et de son avocat (paragraphe 70 ci-dessus). Aucun travailleur social ni aucun psychologue n�avaient �t� associ�s � la pr�paration de cette rencontre. L�entrevue ne dura que quelques minutes, prenant fin lorsque les enfants, de toute �vidence nullement pr�par�es, firent mine de s�enfuir (paragraphes 71-72).

Le 31 janvier 1997, aussit�t apr�s l��chec de cette unique rencontre, le minist�re de la Justice roumain, en tant qu�Autorit� centrale, ordonna le non-retour des enfants au motif qu�elles refusaient d�aller vivre avec leur m�re (paragraphe 73 ci-dessus). Depuis cette date, aucune d�marche ne fut plus entreprise pour tenter de rapprocher la requ�rante et ses enfants.

113.  La Cour note enfin que les autorit�s n�ont pas adopt� les mesures propres � assurer le retour des enfants aupr�s de la requ�rante �num�r�es � l�article 7 de la Convention de La Haye.

Eu �gard � ce qui pr�c�de et nonobstant la marge d�appr�ciation de l�Etat d�fendeur en la mati�re, la Cour conclut que les autorit�s roumaines ont omis de d�ployer des efforts ad�quats et suffisants pour faire respecter le droit de la requ�rante au retour de ses enfants, m�connaissant ainsi son droit au respect de sa vie familiale garanti par l�article 8.

Partant, il y a eu violation de l�article 8.

II. SUR L�APPLICATION DE L�ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

114.  Aux termes de l�article 41 de la Convention,

� Si la Cour d�clare qu�il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d�effacer qu�imparfaitement les cons�quences de cette violation, la Cour accorde � la partie l�s�e, s�il y a lieu, une satisfaction �quitable. �

A. Pr�judice moral

115.  Mme Ignaccolo-Zenide r�clame 200 000 francs fran�ais (FRF) � titre de r�paration du tort moral d� � l�angoisse et � la d�tresse qu�elle aurait �prouv�es faute de mise en �uvre de ses droits parentaux.

116.  Le Gouvernement ne prend pas position.

117.  La Cour estime que la requ�rante doit effectivement avoir subi un pr�judice moral. Compte tenu des circonstances de la cause et statuant en �quit� comme le veut l�article 41, elle lui alloue 100 000 FRF � ce titre.

B. Frais et d�pens

118.  L�int�ress�e sollicite en outre le remboursement d�une somme de 86 000 FRF qu�elle d�compose comme suit :

a) 46 000 FRF pour les frais et d�pens aff�rents � la proc�dure interne, dont 6 000 FRF pour les honoraires de son avocat en Roumanie et 40 000 FRF pour les frais de d�placement et de s�jour qu�il lui a fallu consentir � l�occasion de ses huit voyages en Roumanie ;

b) 40 000 FRF pour les honoraires dus � l�avocat qui l�a repr�sent�e � Strasbourg, conform�ment � la convention d�honoraires conclue le 15 juillet 1998.

119.  La requ�rante invite la Cour � y ajouter � toutes taxes �ventuelles sur la valeur ajout�e �.

120.  Le Gouvernement ne se prononce pas.

121.  La Cour estime que les frais relatifs aux d�marches accomplies, en Roumanie comme � Strasbourg, pour emp�cher ou faire redresser la situation qu�elle a jug�e contraire � l�article 8 de la Convention correspondaient � une n�cessit� ; ils doivent d�s lors �tre rembours�s dans la mesure o� ils ne d�passent pas un niveau raisonnable (voir, par exemple, l�arr�t Olsson c. Su�de (n� 1) du 24 mars 1988, s�rie A n� 130, p. 43, � 104).

La Cour alloue � la requ�rante pour frais et d�pens la somme de 86 000 FRF, � majorer de tout montant pouvant �tre d� au titre de la taxe sur la valeur ajout�e.

C. Int�r�ts moratoires

122.  Selon les informations dont la Cour dispose, le taux d�int�r�t l�gal applicable en France � la date d�adoption du pr�sent arr�t �tait de 3,47 % l�an.

par ces motifs, la cour

1. Dit, par six voix contre une, qu�il y a eu violation de l�article 8 de la Convention ;

2. Dit, par six voix contre une, que l�Etat d�fendeur doit verser � la requ�rante, dans les trois mois, les sommes suivantes, � majorer de tout montant pouvant �tre d� au titre de la taxe sur la valeur ajout�e :

a) pour dommage moral 100 000 FRF ;

b) pour frais et d�pens 86 000 FRF ;

3. Dit, que ces montants seront � majorer d�un int�r�t simple de 3,47 % l�an � compter de l�expiration dudit d�lai et jusqu�au versement ;

4. Rejette, � l�unanimit�, la demande de satisfaction �quitable pour le surplus.

Fait en fran�ais, puis prononc� en audience publique au Palais des Droits de l�Homme, � Strasbourg, le 25 janvier 2000.

Michael O�Boyle Elisabeth Palm

Greffier Pr�sidente

Au pr�sent arr�t se trouve joint, conform�ment aux articles 45 � 2 de la Convention et 74 � 2 du r�glement de la Cour, l�expos� des opinions s�par�es suivantes :

� opinion en partie dissidente de M. Maruste ;

� opinion en partie dissidente de Mme  Diculescu-Şova.

 

E.P.
M.O.B.

Opinion EN PARTIE dissidente de M. le juge Maruste

(Traduction)

Je comprends et puis admettre l�approche formelle adopt�e par la majorit�, mais je n�en ai pas moins vot� contre le constat d�une violation de l�article 8, et ce pour les motifs suivants.

Il me para�t que la solution retenue en l�esp�ce va � l�encontre de l�objet et du contenu m�me d�une affaire telle que celle-ci. Il est vrai que, du point de vue des relations entre les enfants et leurs parents divorc�s ou s�par�s, les exigences d�une vie familiale sont compliqu�es et d�licates. Il est vrai �galement qu�en pratique les organes de Strasbourg se sont toujours montr�s tr�s prudents dans leur mission de contr�le des d�cisions rendues par les autorit�s nationales. N�anmoins, j�estime que ce ne sont pas seulement les parents mais �galement les enfants qui doivent b�n�ficier de l�article 8. J�irais plus loin : les enfants sont et doivent �tre les premiers b�n�ficiaires lorsque les int�r�ts de leurs parents sont en conflit et qu�ils sont eux-m�mes suffisamment m�rs pour exprimer clairement leurs propres pr�f�rences.

Eu �gard � la Convention des Nations unies relative aux droits de l�enfant, et en particulier � son article 4, qui oblige les Etats parties � prendre toutes les mesures qui sont n�cessaires pour mettre en �uvre les droits reconnus dans ledit instrument, les droits et int�r�ts sup�rieurs de l�enfant doivent �tre promus. A cet effet, il s�impose de donner aux enfants la possibilit� d�exercer leurs droits, notamment dans les proc�dures familiales les int�ressant, et de d�ment tenir compte de leur avis (voir la Convention europ�enne sur l�exercice des droits des enfants, STE n� 160). En cons�quence, l� o� les int�r�ts des parents sont en conflit, l�opinion et les pr�f�rences des enfants doivent �tre v�ritablement entendues et prises en consid�ration dans les proc�dures et lors de l�adoption de d�cisions les concernant.

En l�occurrence, il ressort clairement du dossier que les enfants vivent depuis longtemps avec leur p�re. Du point de vue de leurs int�r�ts sup�rieurs, les circonstances qui ont pr�sid� � cette situation et le r�le jou� � cet �gard par chacun des parents ou par les autorit�s publiques ne rev�tent pas une importance d�cisive. Il est constant aussi qu�en l�esp�ce les enfants ont d�clar� express�ment pr�f�rer vivre avec leur p�re ; cette pr�f�rence doit elle aussi entrer en ligne de compte. Je regrette beaucoup que cet �l�ment ait

�t� n�glig�, tant dans les proc�dures internes que dans les proc�dures �trang�res. D�apr�s moi, mettre � ex�cution une d�cision judiciaire ancienne contre la volont� de ceux qui en faisaient l�objet n�est pas loin de constituer une voie de fait.

Par ailleurs, j�estime que les d�fauts et d�lais qui ont entach� la proc�dure rel�vent plut�t de l�article 6 de la Convention que de l�article 8.

Opinion EN PARTIE dissidente de Mme LA JUGE DICULESCU-ŞOVA

Compte tenu des circonstances de la cause, j�exprime mon d�saccord quant � la mani�re dont la Cour a appliqu� l�article 41 de la Convention.

La requ�rante sollicitait une indemnit� pour le pr�judice moral r�sultant de l�impossibilit� d�exercer ses droits parentaux dans laquelle elle se serait trouv�e pendant neuf ans.

C�est pourtant un fait incontestable par l�int�ress�e qu�en 1989 elle a renonc� � ses droits parentaux (paragraphe 10 de l�arr�t) pour des raisons financi�res et fiscales.

C�est aussi un fait incontestable par elle que, de 1989 � fin 1994, il n�y a pas eu, faute de rapports, de vie familiale entre elle et ses filles.

L�intol�rance et le rejet manifest�s par les adolescentes envers leur m�re n�ayant fait que s�accentuer, il est devenu tr�s difficile pour les autorit�s roumaines de respecter � la lettre l�article 8 de la Convention.

La Cour a estim� que les obligations positives pr�vues audit article en mati�re de r�union d�un parent � ses enfants doivent �tre interpr�t�es � la lumi�re de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l�enl�vement international des enfants.

Or l�Etat d�fendeur a respect� la Convention de La Haye et, partant, l�int�r�t des mineures, �vitant ainsi qu�elles ne soient traumatis�es.

Dans ces conditions, et compte tenu, premi�rement, de ce que le conflit et le pr�judice moral all�gu� trouvent leur origine dans l�attitude adopt�e par la m�re d�s 1989, deuxi�mement, de ce que, pendant cinq ans, les filles se sont trouv�es en dehors du territoire et de la juridiction de l�Etat d�fendeur, alors que la somme r�clam�e au titre du pr�judice moral couvre �galement cette p�riode, et, troisi�mement, de la situation de l�Etat d�fendeur � ce stade et dans ce conflit, j�estime que le constat d�une violation de l�article 8 de la Convention e�t repr�sent� en l�esp�ce une r�paration suffisante du pr�judice moral �prouv�.

En ce qui concerne les frais, je juge que la somme de 40 000 FRF allou�e par la Cour pour les honoraires r�clam�s par l�avocat fran�ais ayant d�fendu la requ�rante � Strasbourg est excessive par rapport au travail (m�moire et plaidoirie) effectu�, d�autant qu�aucune note d�honoraires ventilant cette somme n�a �t� produite devant la Cour.


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